Ces dernières années, la bienveillance s’est imposée comme valeur fondamentale au sein de la plupart des organisations. « Le fait d’adopter un comportement empathique au sein d’une équipe fait partie de la bienveillance. L’empathie est différente de la sympathie. Elle induit une véritable écoute active et la compréhension des émotions d’autrui, sans pour autant les vivre à sa place », explique Margaux Tancrède, psychologue du travail à Moka.care. Cette compétence humaine est devenue essentielle dans la sphère professionnelle, car elle contribue à la qualité de vie au travail et à la performance des entreprises.

Cependant, pour l’heure, beaucoup d’actifs ont du mal à faire preuve d’une empathie « saine », développe-t-elle : « Faute de connaissances, de sensibilisation, et de formation autour de ce sujet, les managers et les collaborateurs ont des difficultés à être empathiques, ou à l’inverse, ils tombent dans l’hyperempathie, car la frontière entre les deux est poreuse. » L’empathie bien dosée peut être affective (ressentis) ou cognitive (pensées intellectuelles, analyses d’actes manqués, de non-dits, de langage para-verbal, etc.)

Jusqu’à récemment, la distinction entre la vie personnelle et professionnelle était en effet très marquée. « Les émotions étaient reléguées au second plan, cantonnées à la maison. Depuis le Covid-19, les entreprises y accordent plus d’importance, car derrière toute émotion se cache un vrai besoin. Mais, personne ne change du jour au lendemain sans être accompagné. L’empathie, aussi, ça s’apprend ! », insiste l’experte en psychologie. Sinon, le risque est « d’absorber les émotions des autres, de surinvestir la relation, de s’oublier ». Margaux Tancrède énumère 5 signes qui doivent alerter pour ne pas tomber dans l’hyperempathie :

  • Fatigue émotionnelle (sentiment de vide ou de trop-plein après avoir discuté avec quelqu’un)
  • Culpabilité (penser ne jamais en faire suffisamment pour les autres)
  • Difficulté à dire « non » (y compris lorsqu’il y a une surcharge de travail)
  • Se sentir responsable du bien-être des autres, suranticiper leurs besoins (réels ou non)
  • Eviter les conflits, être dans la fuite

Analyse transactionnelle

Ces différents signaux doivent être identifiés à temps par le manager ou par le collaborateur lui-même, au risque de se confronter à diverses répercussions négatives : privation de temps pour soi, perte de vue de ses propres besoins, épuisement physique ou émotionnel, dégradation de la qualité des relations professionnelles, et de sa performance au travail, etc. La psychologue du travail propose ainsi un exercice concret, basé sur l’analyse transactionnelle, appelé « DDRR ». L’idée étant de se demander dans quelle proportion : je Donne, je Demande, je Reçois, et je Refuse ? L’individu peut attribuer une note sur dix à chacun de ces items, ou se positionner entre « toujours » et « jamais ». « L’objectif est que ces 4 critères soient à l’équilibre le plus souvent possible et dans toutes les relations. Si ce n’est pas le cas, il faut vite rectifier le tir, commente l’experte. Cela permet d’être tourné vers les autres en restant connecté à soi-même »

« Nous pensons à tort que prendre du temps pour soi est égoïste. Or, les émotions, c’est comme dans l’avion : mieux vaut mettre son masque à oxygène d’abord, avant d’aider les autres à mettre le leur. Traiter ses propres émotions, en premier lieu, permet de mieux gérer celles des autres ensuite en gardant la bonne distance », termine Margaux Tancrède.